jeudi 20 octobre 2011

Faut-il interdire aux policiers de garder leur arme à la maison ?

Le 22 septembre 2011, un gardien de la paix en poste à Chevilly-Larue, dans le Val-de-Marne, blessait mortellement sa compagne avant de retourner son arme de service contre lui. Terrible hasard, au même moment, à Paris un autre policier utilisait son arme pour mettre fin à ses jours dans sa voiture. Quelques jours plus tard, le 9 octobre, à Bagneux, une policière de la police aux frontières, âgée de 26 ans, abattait son compagnon, également un policier, avec son arme de service, avant de se suicider. A l'origine du drame, une déception amoureuse. Dimanche dernier, à Carrières-sous-Poissy, dans les Yvelines, c'est un gardien de la paix stagiaire de 22 ans qui blessait à son tour mortellement sa compagne... en jouant avec son arme.

Trois suicides, deux drames familiaux et un accident mortel en moins d'un mois. Autant de tragédies qui appellent la même question : faut-il interdire aux policiers de rentrer chez eux avec leur arme de service ? Pour Pierre-Henry Brandet, porte-parole du ministère de l'Intérieur, "On ne peut que déplorer tous ces drames" qui, insiste-t-il toutefois auprès de TF1 News, "restent extrêmement marginaux" au regard des 135.000 policiers qui possèdent une arme en France. Insistant sur le fait que la "plupart des suicides de policiers se déroulent sur le lieu de travail et non au domicile", "aucune révision de la procédure d'armement des forces de l'ordre n'est aujourd'hui envisagée place Beauvau", poursuit Pierre-Henry Brandet. Et de rappeler, qu'au contraire, "de nombreux drames ou délits sont arrêtés à temps, justement grâce à des policiers qui possèdent leur arme sur eux durant leur trajet travail-domicile".
Des préconisations remises prochainement"Dans un contexte global de prévention du suicide, le directeur général de la police a commandé en octobre 2010 une étude à l'Inspection générale de la police nationale, précise toutefois Pascal Garibian, porte-parole de la police nationale. Les groupes de travail missionnés pour cette étude remettront prochainement leurs préconisations sur le port et la conservation de l'arme".

La règlementation actuelle prévoit qu'un fonctionnaire de police ne peut posséder une arme que sur le ressort territorial où il exerce. A son domicile, il est tenu de la ranger dans un coffre ou une mallette sécurisée après avoir pris soin de dissocier le chargeur de l'arme. S'il prend des congés supérieurs à cinq jours, son arme doit être conservée au sein de son service, dans un coffre.

Une meilleure prévention et une meilleure formation avant tout
Egalement interrogés par TF1 News, les syndicats de policiers ne sont pas favorables à un changement de la règlementation actuelle. "De part son statut, le policier est en service 24h/24 et 7jours/7 et peut donc être amené à utiliser à tout moment son arme pour se protéger lui ou pour protéger autrui dans le cadre de la légitime défense", rappelle Mohamed Douhane, de
Synergie Officiers, 2e syndicat chez les officiers de police. "Laisser les armes au commissariat nécessiterait des infrastructures qui n'existent pas aujourd'hui", précise Yannick Danio, porte-parole d Unité Police SGP-FO, le premier syndicat de gardiens de la paix.

En revanche, prévention et formation pourraient être nettement améliorées. "Certes, pour ce qui est des suicides, posséder une arme sur soi peut faciliter le passage à l'acte, mais la prévention ne peut pas passer par le seul retrait de l'arme à un policier, estime Mohamed Douhane. "La solution passe par un meilleur suivi psychologique de ces fonctionnaires qui épongent au quotidien les drames de la société, complète Yannick Danio. Les débriefings, qui devraient être quotidien, ne sont presque jamais faits", regrette-t-il.

Et pour éviter les dérapages ou les accidents dramatiques, comme celui du week-end dernier à Carrières-sous-Poissy, les deux syndicats recommandent d'accroître la sensibilisation à la sécurité de l'armement lors des formations des jeunes recrues. "La formation actuelle sur l'utilisation et l'appréhension de l'arme est bien trop pauvre, constate ainsi Yannick Danio. Et de s'interroger :"est-il normal que les policiers travaillant dans des unités spécialisées (terrorisme, banditisme...) puissent tirer des centaines de cartouches par an alors que, pour des questions d'économies, un gardien de la paix, pourtant confronté à toutes sortes de situation chaque jour sur la voie publique, ne puisse tirer que 30 cartouches", déplore-t-il.

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