La victoire et la peur. Les séparatistes du Parti québécois
(PQ) ont remporté mardi les élections organisées dans la province canadienne
francophone du Québec sans toutefois
parvenir à obtenir une majorité absolue, selon les projections de trois chaînes
de télévision. Le PQ, qui a obtenu 56 des 125 sièges, va devoir se contenter de
former un gouvernement minoritaire. Le Parti libéral du Québec (PLQ) remporte
pour sa part 47 sièges, soit 17 de moins que dans l'ancienne législature. Si ce
résultat se confirme, Pauline
Marois deviendrait la première femme à devenir Premier ministre de
la province. Pendant la campagne, elle a promis d'organiser un
nouveau référendum sur l'indépendance en cas de victoire.
Mais la joie a été courte. Un homme armé a ouvert le feu au
Métropolis, une salle de spectacles de Montréa, alors que Pauline Marois
prononçait un discours. Une personne a été tuée, une autre grièvement blessée
dans la fusillade, selon la police sur Twitter. Pauline
Marois, qui a été évacuée de la scène sur laquelle elle se trouvait par ses
gardes du corps. Selon le porte-parole de la police, un homme d'une cinquantaine
d'années a été arrêté. Il est également soupçonné d'avoir mis le feu à l'arrière
du bâtiment. Des images diffusées par la chaîne de
télévision RDI montre un homme armé d'un fusil et vêtu d'une
cape noire être maîtrisé par la police et crier en français : "Les Anglais se
réveillent". Il a ajouté en anglais, selon des journalistes canadiens sur place:
"on va vous rendre la monnaie de la pièce". Certains membres de la communauté
anglophone de Québec craignent que l'arrivée au pouvoir des indépendantistes ne
puisse avoir un impact négatif sur leur statut.
Un homme aux propos confus
Dans la salle, l'incompréhension est totale. "Ça a fait bang!
Bang!", raconte un Montréalais d'une soixantaine d'années. "J'étais à l'étage,
quelqu'un qui n'avait pas pu entrer a tiré de dehors", dit-il, le regard perdu.
A l'extérieur, les troupes d'élite de la police de Montréal se sont déployés en
grand nombre au milieu d'imposants camions de pompiers et de quelques étudiants
venus rappeler à Pauline Marois sa promesse d'abolir la forte hausse des frais
de scolarité décrétée par le gouvernement sortant. La nouvelle Première ministre
revient alors sur scène, convie la foule à quitter calmement la salle. Avant de
se reprendre quelques secondes plus tard: "Attendez!", lance-t-elle à ses
partisans, avant de conclure son discours. Mais la fête est bel et bien gâchée.
"Je suis sûr qu'on a voulu la tuer car c'est une femme. Il y en a qui ne sont
pas encore prêts pour ça", juge une militante.
Un journaliste de Radio-Canada a assisté à l'arrestation dans
la ruelle à l'arrière du Métropolis. Un homme aux propos confus a été plaqué à
terre. "Il portait une cagoule noire très fine. Il y avait un long fusil à
terre." L'homme, âgé d'une cinquantaine d'années, avait pénétré dans "le
vestibule arrière" du Métropolis avant de sortir et de tenter de mettre le feu à
une porte, ont précisé les policiers, disant avoir retrouvé "plus d'une arme".
Indépendance par voie de référendum
Peu avant ces événements, le Premier ministre sortant et chef
de file du PLQ, Jean Charest, a reconnu la défaite de sa formation. "Nous
acceptons et nous respectons ce choix (des électeurs)", a dit Charest à ses
partisans, précisant qu'il avait appelé Pauline Marois pour la féliciter. Le
scrutin est aussi un revers personnel pour le Premier ministre sortant, qui a
été battu dans sa circonscription de Sherbrooke.
Le Québec, où le français est la langue maternelle de 80%
des 7,8 millions d'habitants, s'est toujours senti un peu différent au sein d'un
pays où une large majorité des 34,5 millions d'habitants est anglophone. La fête
provinciale est ainsi bien plus célébrée que le "Canada Day" du 1er juillet.
L'indépendance éventuelle du Québec ne pourra intervenir que par voie de
référendum. En 1980, la défaite des séparatistes avait été lourde mais en 1995,
il s'en était fallu d'un cheveu pour qu'ils l'emportent, recueillant 49,4% des
suffrages.
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