mardi 7 août 2012

L'étudiante lyonnaise libérée par Ankara

La Franco-turque Sevil Sevilmi, qui était détenue depuis le 10 mai pour des liens supposés avec une organisation d'extrême-gauche, ne sait toutefois pas encore si elle a le droit de rentrer en France.

Fin du cauchemar pour Sevil Sevimli. L'étudiante franco-turque, emprisonnée depuis mai en Turquie pour des liens supposés avec une organisation clandestine d'extrême-gauche, a été libérée lundi, mettant fin à plusieurs mois de tension diplomatique entre Paris et Ankara.
«Cet après-midi, des gardiens sont venus la voir avec ses trois autres camarades dans leur cellule. Ils leur ont dit 'vous prenez vos affaires et vous sortez'», a raconté lundi Sinem Elmas, figure du comité de soutien et amie d'enfance de Sevil Sevimli. «C'est une surprise pour elle, ses camarades et sa famille. On ne s'y attendait pas, d'autant qu'aujourd'hui on a appris que la date de son procès était fixée au 26 septembre», a-t-elle ajouté. «En ce moment, elle est à Eskisehir et dîne avec sa mère, son petit frère, sa soeur et ses trois camarades» libérées avec elle, a précisé son amie, qui a pu parler à la jeune femme dans la soirée.
«On ne sait pas encore quand elle reviendra en France, on ne sait pas si elle a le droit de rentrer. On ne sait rien sur ses conditions de liberté», a encore dit Sinem Elmas, tempérant la bonne nouvelle. Ses proches ne savent notamment pas de façon certaine si son procès est maintenu et si elle sera tenue d'y assister.

«Pas une militante»

La jeune Française de 20 ans, qui a également la nationalité turque, était partie en échange Erasmus à l'université Anatolie d'Eskisehir (300 kilomètres au sud-est d'Istanbul) «afin de mieux connaître son pays d'origine», avait expliqué son avocat, Me Sami Kahraman. L'étudiante en licence information-communication à l'université Lyon-2 avait été arrêtée et incarcérée le 10 mai, avec cinq autres jeunes. Depuis la mi-juin, sa mère vivait sur place, afin de pouvoir la voir au parloir.
Selon sa défense, il lui était reproché d'avoir participé au défilé du 1er Mai, pourtant légal, à Istanbul, et d'avoir assisté, parmi 350.000 autres spectateurs, à un concert deYorum, un groupe luttant pour les droits et les libertés depuis 1985. Elle avait également collé une affiche en faveur de la gratuité de l'enseignement. Les autorités la soupçonnaient par conséquent d'entretenir des liens avec une organisation armée d'extrême-gauche, le Front-Parti de libération du peuple révolutionnaire (DHKP-C), à l'origine de nombreux attentats depuis 1976. Elle encourait 20 ans de prison. Or, la double nationalité n'étant pas reconnue en Turquie, Sevil Sevimli était une simple citoyenne turque au regard des autorités locales, ce qui laissait peu de marge de manœuvre au Quai d'Orsay. D'autant plus qu'en vertu d'une loi antiterroriste de 2006, son dossier était classé confidentiel. L'ambassade de France n'avait ainsi été autorisée à lui rendre visite que près de deux mois après son incarcération.

Dégradation de son état de santé

«C'est quelqu'un qui a des idées de gauche mais ce n'est pas une militante. Elle veut être journaliste et s'intéresse à tout», a pourtant toujours soutenu son amie Sinem Elmas, organisatrice d'une manifestation de soutien qui a rassemblé plus de 350 personnes à Lyon le 17 juin.
La mobilisation en sa faveur a été importante en France, avec notamment un éditorial du Monde du 29 juin interpellant le premier ministre turc Recep Tayyip Erdogan sous le titre «Quel crime a commis Sevil Sevimli, M. Erdogan?». «Qui aurait pu penser qu'une telle chose arriverait aux portes de l'Europe?», a de son côté demandé le président de l'université Lyon-2, Jean-Luc Mayaud, dans une lettre publique où il appellait à la «libération immédiate» de son étudiante, se disant «prêt à aller témoigner à Ankara s'il y a un procès». Affirmant que son état de santé se dégradait, en raison d'une hypothyroïdie et d'asthme, son comité de soutient avait envoyé samedi une pétition signée par 13.000 personnes au ministre des Affaires étrangères Laurent Fabius et à la ministre du Droit des femmes, Najat Vallaud-Belkacem.

http://www.lefigaro.fr/international/2012/08/07/01003-20120807ARTFIG00228-l-etudiante-lyonnaise-liberee-par-ankara.php

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