mercredi 6 juin 2012

Affaire DSK : un journaliste américain démonte la thèse du complot

Le livre est paru mardi aux Etats-Unis ; écrit par John Solomon, le journaliste ayant interviewé la femme de chambre Nafissatou Diallo pour Newsweek, il prend le contrepied de la thèse du complot défendue auparavant par un autre célèbre journiste américain, Edward Jay Epstein, selon qui Dominique Strauss-Kahn était sous la surveillance des services secrets français. DSK, le scandale qui a fait chuter Dominique Strauss-Kahn raconte au contraire toutes les failles de l'enquête, toutes les approximations ou les erreurs qui ont pu bénéficier à l'ancien patron du FMI, qui était alors considéré comme le favori de la course présidentielle en France.
Selon lui, la police de New York et le procureur ont commis des erreurs dès le début. Le 14 mai, alors qu'il vient d'être arrêté et conduit dans un commissariat de Harlem sur la base des accusations de la femme de chambre du Sofitel de New York, DSK ne sera pas interrogé pendant plus de six heures, rapporte le journaliste dans son livre. Ce délai empêchera d'avoir sa version des faits : à 23 heures, son avocat, qui l'a enfin localisé, lui enjoindra en effet de ne pas parler.
Cyrus Vance, un procureur "inexpérimenté"
Le procureur élu de Manhattan Cyrus Vance occupait ses fonctions au moment de l'affaire depuis 16 mois. Son travail, écrit John Solomon, a été celui d'un "procureur inexpérimenté, projeté dans l'arène alors qu'il n'était pas encore prêt". Cela explique selon lui l'inculpation au pas de charge de DSK et "la réaction excessive dans l'autre direction" quand seront découverts les mensonges de Nafissatou Diallo sur son passé. Il souligne également que la responsable de la section des crimes sexuels de l'équipe Vance, Lisa Friel, 25 ans d'expérience, a été écartée au profit de deux procureurs spécialistes des affaires de meurtre, dont "aucune n'avait l'expérience, la formation, ou le tempérament pour traiter avec une femme de chambre immigrée compliquée". Elles prendront selon lui très mal en juin le fait que Diallo ait menti, en affirmant avoir été victime d'un viol collectif en Guinée : un récit "embelli" d'un viol réel, concocté quelques années plus tôt pour obtenir l'asile aux Etats-Unis.
Peu importe que ses collègues lui ayant parlé au Sofitel soient tous convaincus par le récit d'une collègue analphabète qu'ils décrivent comme timide et travailleuse. Peu importe les éléments matériels corroborant ce récit. "C'était le début de la fin de la procédure pénale contre DSK. Et les jours suivants verront une escalade dans les insultes entre l'équipe des procureurs et l'avocat de Diallo", écrit Solomon. Des fuites dans la presse empoisonnent un peu plus le climat. Pourtant, écrit l'auteur, l'avocat du Sofitel, Lanny Davis, juriste chevronné, a lui aussi interrogé Nafissatou Diallo et s'est dit "convaincu". L'ouvrage explique aussi que la femme de chambre ne voulait pas parler à la police, craignant de perdre son travail. Ce n'est qu'après avoir été rassurée, qu'elle aurait accepté.
Un problème de traduction
L'auteur affirme aussi que le signal du BlackBerry perdu par Dominique Strauss-Kahn a montré "qu'il s'éloignait de l'hôtel" lorsqu'il a cessé d'émettre, contredisant l'idée selon laquelle il aurait été volé par Diallo.
John Solomon affirme aussi que les procureurs ont affirmé à tort qu'elle avait changé sa version sur ce qui s'était passé après l'incident. Quand elle explique le 28 juin, via un traducteur remplaçant - Diallo parle un dialecte fulani - qu'elle a nettoyé la suite voisine de celle de DSK, les procureurs comprennent qu'elle parle d'après l'incident. Mais selon les relevés des clés magnétiques, c'était avant. "Ils n'ont jamais admis qu'il était possible qu'ils n'aient pas compris Diallo sur la séquence des événements", écrit-il. Et il affirme que ce n'est pas Nafissatou Diallo qui a mentionné au téléphone dans une conversation en fulani le 16 mai que DSK était un homme riche, mais son "ami" emprisonné Amara Tarally.

Aucun commentaire: