vendredi 2 mars 2012

Sauvetage d'Edith Bouvier : soulagement et zones d'ombre

La journaliste française Edith Bouvier, blessée le 22 février lors des bombardements de Homs, en Syrie, et son compatriote, le photographe William Daniels, sont arrivés aux premières heures de vendredi à Beyrouth après une opération d'évacuation de Syrie extrêmement risquée. Désormais hors de danger, ils "sont tous deux sous observation à l'Hôtel-Dieu de France à Beyrouth", a précisé une source diplomatique, information confirmée à la mi-journée par Nicolas Sarkozy lors de sa conférence de presse à Bruxelles où se tient le sommet de l'UE.

Des membres du personnel de l'ambassade de France et un médecin libanais, qui ont pu les rencontrer dès jeudi soir à la frontière entre la Syrie et le Liban, ont jugé que la blessure d'Edith Bouvier n'empêcherait pas son transfert aérien. Un avion gouvernemental médicalisé a d'ailleurs quitté Paris dans la matinée pour aller chercher le groupe. Il devrait être de retour en France avant ce soir.

Dès jeudi soir, les autorités françaises se sont voulues rassurantes. "Tout est fait pour assurer leur suivi médical et leur rapatriement dès que possible", a déclaré Alain Juppé dans un communiqué. "Je peux vous confirmer que là, c'est officiel, elle et lui sont en sécurité", a assuré pour sa part Nicolas Sarkozy. "Je viens de m'entretenir avec Edith Bouvier, qui est naturellement très fatiguée, qui a beaucoup souffert mais qui sait qu'elle est libre et qu'elle sera bientôt soignée." La jeune femme, âgée de 31 ans, souffre d'une fracture du fémur de la jambe gauche avec déplacement des os ce qui, selon Nicolas Sarkozy, "a beaucoup compliqué" l'évacuation. Il a également dit que le président syrien Bachar al-Assad, dont les troupes bombardent Homs, un des principaux foyers de l'opposition à son régime, n'avait pas facilité l'opération.

D'autres journalistes étrangers encore sur place

Des conditions de cette évacuation, peu de détails ont filtré. Dans une brève déclaration à la presse en marge du Conseil européen, Nicolas Sarkozy a remercié "tous ceux qui ont contribué" à l'exfiltration d'Edith Bouvier et de William Daniels. Qui sont-ils ? Le chef de l'Etat a parlé de "démocrates syriens" et de "démocrates qui sont dans des pays voisins", sans entrer dans les détails à cause de la "tension extrême" régnant en Syrie et de la nécessité de "protéger certaines personnes". Et de souligner : "Les gens qui ont permis l'exfiltration ont risqué leur vie et ce n'est pas la peine de leur faire prendre d'autres risques". Tout au plus a-t-il indiqué que l'opération a été menée "via des gens efficaces". Il a aussi précisé que l'évacuation, "extrêmement compliquée", avait commencé jeudi en milieu d'après-midi, après une semaine de tentatives infructueuses via le Comité international de la Croix-Rouge internationale et le Croissant-Rouge arabe syrien. "L'urgence médicale primait et Edith Bouvier et son compagnon devaient quitter le lieu où ils se trouvaient par tous les moyens disponibles", a-t-il fait valoir.

Interrogé sur LCI à propos de l'évacuation d'Edith Bouvier, Etienne Mougeotte, directeur de la rédaction du Figaro, s'est montré plus explicite. Il a indiqué qu'il y avait "deux voies possibles" : soit elle partait avec le Croissant Rouge et le Comité international de la Croix-Rouge, via Damas, soit "les soldats de l'ASL", c'est-à-dire l'Armée syrienne libre, regroupant des soldats déserteurs et en lutte contre Bachar al Assad, "l'acheminaient clandestinement vers le Liban". Finalement, "c'est cette deuxième voie qu'a utilisée Edith".

Un photographe britannique, Paul Conroy, blessé lui aussi, se trouve déjà en sécurité au Liban. Mais selon Nicolas Sarkozy, d'autres journalistes étrangers sont encore sur place. Les autorités syriennes affirment pour leur part avoir retrouvé les corps de Marie Colvin et de Rémi Ochlik, tués il y a huit jours lors des bombardements de Homs, dans le quartier de Baba Amr, repris par l'armée régulière. Avant cette annonce, une vidéo diffusée sur internet avait montré des images présentées comme l'inhumation des deux journalistes par des opposants au régime syrien. Un homme portant une blouse de médecin, un masque chirurgical et un stéthoscope y montrait deux corps enveloppés dans des linceuls blancs portant leurs noms et expliquait qu'ils avaient dû être enterrés du fait des coupures d'électricité qui empêchaient leur conservation. "Marie Colvin est tombée en martyr à Bab Amr parce qu'elle transmettait (...) un message humanitaire, parce qu'elle révélait ce qui se passe réellement à Bab Amr", expliquait-il dans ce document daté du 27 février.

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