samedi 24 décembre 2011

Vin : la bataille de "Cheval Blanc" devant le justice à Bordeaux

Le Château Guiraud-Cheval-Blanc est définitivement rayé de la carte des vins. Ainsi en ont décidé le tribunal de grande instance de Bordeaux, puis la cour d'appel de Bordeaux et enfin la Cour de cassation. Au début du mois dernier, la chambre commerciale, financière et économique de la plus haute juridiction judiciaire a déclaré « non admis » le pourvoi formé par les propriétaires de cette bouteille de l'appellation Côtes-de-Bourg.
C'est l'épilogue d'une procédure lancée en octobre 2006 par la SCI du Cheval Blanc. Les actionnaires du célèbre saint-émilion grand cru classé A dénoncent depuis plusieurs années la contrefaçon par imitation de leur marque et multiplient les assignations en direction de tout ce qui s'appelle pour tout ou partie « Cheval Blanc ».

En pleine crise viticole
Les petits vins - le Château Guiraud-Cheval-Blanc se vendait à moins de 7 euros -, par leur nom, viendraient parasiter le prestige et la renommée internationale de Cheval Blanc. Les pots de terre contre le pot de fer. « Pour moi c'est du vol », s'insurge Laurent Deliaune, le gérant de la SCEA qui porte le nom de son père, Bernard, et produisait feu le Château Guiraud-Cheval-Blanc ainsi que le Château Nicoleau. « Le vol de mon nom, de mon histoire. » Sa famille sort rincée, douchée à froid de sa confrontation avec les juges. Avec un profond sentiment d'injustice. En pleine crise viticole, c'est un manque à gagner important.
« Nous ne jouons pas dans la même catégorie, poursuit le gérant. Je ne leur conteste pas qu'ils sont plus beaux, plus forts et que leur vin est meilleur, même si en rapport qualité-prix je n'en suis pas sûr. Mais nous ne nous sommes jamais cachés, cela faisait des dizaines d'années que notre vin portait ce nom. » Mentionné au guide Hachette des vins et ayant reçu plusieurs prix, « Château Guiraud-Cheval-Blanc » n'avait rien de confidentiel.
« De nature à tromper »
L'annulation de la marque « Château Guiraud-Cheval-Blanc » a été finalement ordonnée pour déceptivité. « En vertu du Code de la propriété intellectuelle, une marque est considérée comme déceptive si elle est de nature à tromper, à induire le public en erreur sur la nature, la qualité, l'origine du produit, rappelle pédagogiquement Me Éric Agostini, avocat de la SCI du Cheval Blanc. Or c'est bien là le nœud du problème. Il peut y avoir confusion dans l'esprit du consommateur, attiré par la mention Cheval Blanc. Et donc déception à la dégustation, dilution de la marque, perte d'attractivité. » L'arrêt de la cour d'appel est explicite pour justifier la radiation. « En incluant dans la deuxième marque de vin qu'elle commercialise au titre de la production de Château Nicoleau la dénomination Cheval Blanc, la SCEA Deliaune a manifestement tenté de se situer dans la sphère de notoriété de l'un des plus grands crus classés de Saint-Émilion et d'usurper les qualités inhérentes à ces derniers sans droit toponymique crédible. »
Pourtant les Deliaune, d'arrière-grands-pères en arrière-petits-fils - la famille a fourni un célèbre député à la Gironde -, n'ont pas sorti le nom de leur chapeau. Il correspond en fait à une parcelle sise au lieu-dit Cheval Blanc à Saint-Ciers-de-Canesse.
« Ils ont zappé le décret de 1993 », ne décolère pas Laurent Deliaune. Le décret en question retient le principe d'« une exploitation, un nom de château ». Mais il offre la possibilité par dérogation d'utiliser un deuxième nom dans deux situations. S'il y a eu réunion de deux exploitations distinctes, ce qui n'était pas le cas ici, ou si la notoriété du deuxième nom a été acquise depuis plus de dix ans avant le décret. Le Château Guiraud-Cheval-Blanc satisfaisait à cette dernière exigence.
D'où le dépit des Deliaune. « Le décret de 1993 n'impose pas le cumul des deux conditions (réunion de deux exploitations, antériorité de la marque). Une seule suffit. » Me Agostini ne dit pas le contraire. « Ce n'est peut-être pas satisfaisant du point de vue de la science du droit, mais les juges ont par ailleurs parfaitement motivé leur décision sur ce parasitisme. » En rejetant toutefois la demande de dommages et intérêts conséquents formulée par la SCI du Cheval Blanc.

http://www.sudouest.fr/2011/12/19/sur-de-son-cheval-blanc-585161-7.php

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